A la tribune des Nations Unies à l’occasion de la 79ème session de l’Assemblée générale, le ministre d’Etat, Porte-parole du gouvernement, le Colonel Abdoulaye Maïga a prononcé un discours en accusant notamment l’Algérie de «grave ingérence dans les affaires intérieures du Mali». Bien qu’accueilli en héros par ses soutiens, son discours ne fait l’unanimité à Bamako où les avis divergent.
Le passage du Colonel Abdoulaye Maïga, ministre d’État, ministre de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, Porte-parole du gouvernement à la tribune des Nations Unies à l’occasion de la 79ème assemblée générale a attiré l’attention du monde entier. Si en 2022, il n’avait pas été tendre avec la France et certains présidents ouest-africains dont Mohamed Bazoum du Niger et Alassane Ouattara de la Côte d’Ivoire, cette année son discours a marqué les esprits par les mots utilisés contre l’Algérie, à travers deux diplomates algériens.
«M. le ministre des Affaires étrangères (algérien), l’Accord est bel et bien mort, vos incantations ne serviront pas à le ressusciter. Vous me donnez l’occasion d’une part, de vous réitérer que nul ne peut aimer le Mali, plus que les Maliens et d’autre part, de vous rappeler que le Mali et son peuple ne seront pas des spectateurs face aux assauts et l’adversité : pour chaque mot employé de travers, nous réagirons par réciprocité, pour chaque balle tirée contre nous, nous réagirons par réciprocité. A bon entendeur, tant pis ! », a-t-il lancé depuis la tribune de l’ONU. Au-delà de «saluer la sagesse» du président algérien, il a traité le ministre des Affaires étrangères et le représentant permanent de l’Algérie auprès de l’ONU «d’énergumènes diplomatiques …».
«Un discours souverainiste»
Ces propos, qualifiés « inappropriés» par le gouvernement algérien, sont diversement appréciés par les Maliens. Pour beaucoup de Maliens, le Colonel Abdoulaye Maïga n’a «dit que la vérité», estimant que son discours répond aux préoccupations des populations maliennes. «Abdoulaye Maïga a résumé les problèmes du Mali, il a dénoncé les ingérences de l’Algérie qui ne sont cachées à personne. Il a aussi dénoncé le soutien de l’Ukraine aux terroristes», soutient, dans une vidéo, Aboubacar Sidick Fomba, membre du Conseil National de Transition (CNT).
Selon Adama Togo, enseignant, «ce discours doit être enseigné dans les écoles maliennes comme modèle de souveraineté». Le trentenaire ajoute que le ministre d’État a «prouvé à l’Algérie et au monde entier que le Mali ne sera jamais une marionnette».
Son discours a également suscité l’adhésion des soutiens de la Transition notamment des responsables politiques. Ce qui explique l’accueil réservé à lui et à sa délégation, à Bamako, mercredi dernier.
«Discours non diplomatique»
Contrairement à ceux-ci, son intervention est désapprouvée par d’autres citoyens. Pour certains, même si ce que le Colonel dit est une vérité, les termes utilisés sont «durs». C’est le cas de Issa Kaou N’Djim, leader politique, ancien membre du CNT et ancien soutien de la Transition. Selon lui, les liens forts qui lient Mali et l’Algérie devaient être pris en compte dans le discours. Pour lui, la crise entre le Mali et l’Algérie doit être gérée de façon diplomatique.
Le président du parti Yelema, Dr Youssouf Diawara est, lui aussi, favorable à la gestion diplomatique de la crise en lieu et place «des invectives». «Si on pouvait sortir des invectives. On se posait la question, quelle expression sera utilisée encore? On a été bien servi. Après abandon en plein vol, après se dribbler sois même tout en gardant le ballon, nous voici à bon entendeur tant pis», a confié ce leader. Il indique que le Colonel Abdoulaye Maïga a parlé des défis qui assaillent le Mali ( le terrorisme, l’implication d’autres États dans nos affaires internes, le changement climatique, les déplacés, la brouille diplomatique avec l’Algérie, entres autres). Mais, à son entendement, « l’on peut dire les choses les plus difficiles de la meilleure façon en diplomatie».
Yacouba Diarra, un soutien à la transition, souligne qu’on doit sortir de ces discours «durs» pour gérer la crise dans la diplomatie. «On ne peut pas, chaque année, tenir de nouveaux termes durs au siège des Nations Unies alors qu’on a d’énormes difficultés à l’interne» déplore-t-il.
BG/NouvelleAfrique